LES LIVRES D'ANTOINE, février 2024 : lire l'article en entier
Remis sur le devant de la scène par le bon mais infidèle film de Xavier Beauvois (2017) avec une excellente Nathalie Baye, Les gardiennes se lisent facilement et agréablement. Ernest Pérochon, cet instituteur des Deux-Sèvres, avait connu la célébrité avec Nêne, prix Goncourt 1920. Son talent de conteur rendent ses romans très attachants. Les personnages sont fort bien campés et l’auteur nous offre de belles descriptions du Marais.
Nous avions chroniqué sur ce blogue Au cri du chouan, magnifique roman sur la révolte des paysans du nord des Deux-Sèvres contre la république. Une réédition semble prochaine.
Il est heureux que Pérochon soit à nouveau lu. Il raconte de bonnes histoires dans un excellent français. Les personnages ont souvent de solides défauts, mais ils font leur devoir dans un monde où les choses sont encore à leur place.
Durant la Première Guerre mondiale, alors que tous les hommes valides sont mobilisés sous les drapeaux, les femmes restées à l'arrière doivent prendre la relève dans les campagnes, cumulant le travail domestique et le travail aux champs. "Les Gardiennes" raconte l'histoire de quelques-unes d'entre elles dans une ferme du bocage poitevin. Hortense Misanger, 58 ans, maîtresse femme énergique, autoritaire et dûre à la tâche, est la grande gardienne de l'exploitation agricole. Son mari est trop usé pour travailler. Ses trois jeunes fils et son gendre, tous paysans, sont au combat sur le front. Solange, leur fille, exploite à grand peine la propriété de son mari, fait prisonnier en Allemagne. Engagée comme domestique pour aider aux champs et à la maison, Francine est une jeune orpheline tout juste sortie de l'Assistance Publique. Marguerite, petite boulangère du village, est amoureuse de l'un des fils Misanger.
Entre les travaux agricoles harassants, l'éducation des enfants, les réquisitions de chevaux pour l'effort de guerre, les lettres aux soldats, les permissions des fils qui tombent les uns après les autres au champ d'honneur, les intempéries, l'arrivée des premières machines agricoles, la présence au village de soldats américains alliés qui tentent de séduire les femmes, les problèmes de succession et de partage des terres, et toute l'âpre vie quotidienne du monde paysan en ce début du XXe siècle, se noue une intrigue faite de solidarité, de fidélité, de sororité, d'émancipation féminine, de pudeur sentimentale, mais aussi de rivalités et de frustrations amoureuses et sexuelles, de pressions morales et d'injustices sociales, de délations, trahisons et ingratidudes.
Ernest Pérochon, instituteur dans son bocage natal des Deux-Sèvres, lauréat du prix Goncourt 1920, futur grand résistant en 1940, rend ici un très réaliste et très poignant hommage à toutes ces femmes courageuses qui ont assuré le travail paysan malgré les épreuves, permettant ainsi de garder intact le patrimoine rural et de nourrir la population française pendant la Grande Guerre. "Les Gardiennes", avec son style tout en simplicité, son ton ouvertement pacifiste et féministe avant l'heure, sa justesse des descriptions et des portraits, reste le seul témoignage littéraire de l'entre-deux-guerres sur le rôle capital de ces femmes épouses, filles ou mères de poilus.
Le roman a été adapté en 2017 au cinéma par Xavier Beauvois, avec Nathalie Baye, Iris Bry et Laura Smet dans les principaux rôles.
1885
Fiche technique
- Reliure
- Broché
- Parution
- 2017
- Nombre de pages
- 342
- Hauteur
- 17.5
- Largeur
- 13.5
- Épaisseur
- 2.5
- Poids
- 0.419kg
- ISBN
- 9782371090590