SELECTION ANNE BRASSIE ETE 2023
LE NOUVEAU PRESENT, avril 2023 :
Le bonheur du critique littéraire est de suivre une oeuvre, de la voir s’épanouir et d’être à chaque fois comblé par le récit et le style. Je lis l’écrivain franco russe Andreï Makine, aujourd’hui académicien, depuis 27 ans. Depuis ses premières parutions dont le célèbre Testament français, prix Goncourt et prix Goncourt des lycéens. Il publie presque tous les 2 ans un roman magnifique. Le dernier, L’ancien calendrier d’un amour est une fresque du 20ème siècle russe. Le roman commence dans le cimetière des hauteurs de Nice où un vieux russe exilé conseille à un jeune homme :“Ne dites jamais” ce n’est plus” mais dites toujours avec gratitude ”ce fut”. Le héros a connu les horreurs de la révolution russe inspirée de la nôtre, ne pas l’oublier, l’exil à Paris, la guerre, la résistance. Un amour de quelques jours dans le champs des derniers épis en Crimée sera son viatique pour la vie entière.
Pourquoi l’ancien calendrier pour cet amour ? Parce que les soviétiques comme nos révolutionnaires ont changé le calendrier. Evoquons son style d’abord. Un écrivain, amoureux des lettres, Nicolas Soudray sur le site Montesquieu avec nous, souligne, dans une comparaison avec François Cheng, leur extraordinaire force de maîtriser deux langues et de la manier en poète. Etonnante est la poésie qui se dégage des rivages de Crimée, ce paradis russe en 1914 qui deviendra un enfer lorsque les soviétiques acculeront à la mer les russes blancs, ces amours sur un champs des derniers épis, épis qui demeurent après les bombardements, cette délicatesse d’une table dressée avec amour par une pauvre fille pour honorer son jeune amoureux dans un phare à moitié écroulé où se cachent les héros. Ces moments de bonheur dans l’oeuvre de Makine surgissent comme des éclairs au milieu de la tempête et l’on sent que l’écrivain est profondément désenchanté. Son enfance fut endeuillée et cruelle et avant de s’exiler, il fit la guerre,notamment en Afrique. Il en revint comme on revient de l’enfer ne croyant plus en rien ni personne. Il dit, le 27 février dernier dans un entretien au Figaro, qu ‘il vit le conflit russo-ukrainien comme un déchirement insoutenable. D’où un halo de tristesse mélancolique qui nimbe ses lignes.
On retrouvera le héros à Paris, sous l’Occupation où il aide les résistants. Un film pourrait s’inspirer de ce livre et ferait comprendre quelques petites choses à nos contemporains sans savoir ni mémoire. On a évoqué bien à tort, un 19ème siècle stupide, mais le 20ème lui succéda, sinistre et mortifère. Les très nombreux lecteurs de Makine témoignent tous de l’élégance dans le malheur de certains êtres qui permettent de ne pas désespérer complètement de l’humanité.
ANNE BRASSIE, mars 2023 : Andreï Makine revient de guerre, désenchanté mais lumineux
Anne Brassié et TVL ont l’honneur et la joie de recevoir l’un des plus grands écrivains contemporains, Andreï Makine. Académicien franco-russe, l’écrivain publie presque tous les 2 ans un roman magnifique. « L’ancien calendrier d’un amour » est une fresque du XXème siècle russe. Le roman commence dans le cimetière des hauteurs de Nice où un vieux russe exilé conseille à un jeune homme : « Ne dites jamais ce n’est plus mais dites toujours avec gratitude, ce fut ». Le héros connaîtra les horreurs de la révolution russe (enfantée par la nôtre, ne pas l’oublier), l’exil à Paris, la guerre, la résistance. Un amour de quelques jours dans le champ des derniers épis en Crimée sera son viatique pour la vie entière. Magnifique vous dis-je !
BULLE DE CULTURE :
Comme à son habitude, Andreï Makine, avec sobriété, concision, déroule un roman qui se révèle émouvant, dans un monde défunt, à jamais révolu, celui de la Russie tsariste, aux personnages bien campés, tout au moins pour les principaux. En peu de pages, le lecteur est immergé dans le monde de Valdas, attachant, brinquebalé d’un événement à un autre, d’une rencontre à une autre. Une vie banale, pas tant que cela en réalité, soumise à la dureté d’évènements historiques, restituée par une plume alerte, poétique, précise. L’essentiel, juste ce qui est nécessaire, est évoqué. Ainsi quelques jours heureux vécus revêtent beaucoup plus d’importance que toute une vie écoulée, ce que marque la construction parfaite du livre dont les deux tiers sont consacrés à la période vécue hors de France. Il n’y a aucune nécessité à ce que ce roman eut été plus long, au risque de nuire à son charme et son efficacité.
Un livre qui peut se dévorer en quelques heures, mais surtout par une lecture plus lente, par séquences, à voix haute par instant, pour mieux apprécier la beauté de la prose travaillée, classique et envoutante de L’ancien calendrier d’un amour.
LE FIGARO, Christian Authier, janvier 2023 : guerre après guerre
L’écrivain raconte la vie extraordinaire d’un homme ordinaire ayant traversé le tumultueux XXe siècle. Si l’œuvre d’Andreï Makine est irriguée par une variété d’inspirations, l’un des fils rouges reliant nombre de ses romans consiste à retracer les destinées extraordinaires d’êtres ordinaires plongés au cœur des tumultes de l’Histoire. Dans la lignée du très beau L’Ami arménien , paru en 2021, l’académicien raconte avec L’Ancien Calendrier d’un amour la vie de Valdas Bataeff.
Âgé de 15 ans en août 1913, quand débute le récit, il passe ses vacances dans la villa familiale de Crimée auprès de son père, un avocat en vue acquis aux idées nouvelles, et de sa jeune belle-mère férue de théâtre (et de comédiens). Ayant surpris un soir le trafic de contrebandiers de tabac non loin d’une baie donnant sur la mer Noire, l’adolescent rencontre Taïa, liée aux trafiquants et qui travaille dans un bar. L’envoûtement et la découverte d’«une vie affranchie des lois de ce monde» dureront le temps de l’été, mais il faut rentrer à Saint-Pétersbourg. La Grande Guerre éclate. 1917 devait être pour Valdas l’année…
LA CROIX : « L’Ancien calendrier d’un amour », d’Andreï Makine : à l’écart du temps
Critique La traversée du XXe siècle d’un quidam russe exilé en France après la révolution bolchévique s’impose en récapitulation romanesque majeure.
« Qu’importe l’éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l’infini de la jouissance. » (Baudelaire) Tel serait l’esprit de cette saga lapidaire – un siècle de fureur et de sang que va traverser Valdas Bataeff en affrontant, tout jeune, les événements tragiques de son époque.
Au plus fort de la tempête, il parvient à s’arracher à la cruauté du monde : un amour clandestin dans une parenthèse enchantée, entre l’ancien calendrier de la Russie impériale et la nouvelle chronologie imposée par les « constructeurs de l’avenir radieux ». Chef-d’œuvre de concision, ce roman sur la trahison, le sacrifice et la rédemption nous fait revivre, à hauteur d’homme, les drames de la grande Histoire : révolutions, conflits mondiaux, déchirements de l’après-guerre.
Pourtant, une trame secrète, au-delà des atroces comédies humaines, nous libère de leur emprise et rend infinie la fragile brièveté d’un amour blessé.
593
Fiche technique
- Reliure
- Broché
- Parution
- 2023
- Nombre de pages
- 198
- Hauteur
- 20.5
- Largeur
- 13
- Épaisseur
- 1.6
- Poids
- 0.220 kg
- ISBN
- 9782246832300