Viktor Nekrassov
Dans les tranchées de Stalingrad - La ville natale, carnets d'un badaud
LES LIVRES D'ANTOINE, novembre 2021 : lire l'article en entier
Les débats politiques sont quasiment absents. L’auteur n’était pourtant pas dépourvu d’idées puisqu’il soutint Soljenitsyne plus tard et connut alors de sérieux ennuis. Aujourd’hui encore, lorsqu’un article ou un livre russe évoque les récits de guerres, le livre de Victor Nekrassov est toujours cité. Il a aussi, de ce fait, valeur de document. Le lecteur observe avec intérêt cet état d’esprit du combattant russe, courageux et patriote.
A une ou deux exceptions près, on ne connait pas ses idées sur Staline ou le communisme, comme si cette guerre était une parenthèse patriotique. L’ennemi a envahi notre pays, il doit partir, c’est aussi simple que cela.
Un livre instructif, facile à lire, qui nous fait bien comprendre pourquoi Napoléon et Hitler ont eu tort d’envahir la Russie : en aucun cas, ils ne pouvaient gagner.
Le livre rassemble trois titres majeurs de l'oeuvre de Viktor Nekrassov. Tout d'abord Dans les tranchées de Stalingrad, son premier roman, pour l'écriture duquel il s'est très largement inspiré de sa propre expérience de guerre, est la chronique de la vie quotidienne des soldats et d'un bataillon durant la Seconde Guerre mondiale. Cette oeuvre est récompensée par le prix Stalineen 1946, malgré le fait que le récit ne correspond pas à la description de l'héroïsme de guerre, de rigueur à cette époque. En effet, le thème principal du livre est l'exécution d'un ordre absurde qui coûte la vie à la moitié d'un régiment et met surtout l'accent sur l'amitié entre les combattants. Mais l'approbation de Staline lui-même met fin à la polémique qu'avait suscité la parution de l'oeuvre, jugée "pacifiste".
Ce texte n'est pas seulement un récit de guerre, l'engagement de l'auteur ainsi que son style sobre et élégant, en font une oeuvre universelle qui rencontre immédiatement un grand succès. Un film intitulé Les Soldats et réalisé par Alexandre Ivanov en 1956 en est tiré. Avec son deuxième roman paru en 1954, La Ville natale, Viktor Nekrassov s'éloigne du réalisme soviétique. Il relate l'histoire d'un soldat qui s'oppose à une campagne injuste contre un professeur de l'institut où il étudie. Le livre déclenche lui aussi une véritable polémique, notamment car la plupart des figures de dirigeants sont des personnages négatifs. Mais il est tout de suite apprécié pour la vérité des situations et des caractères. Carnets d'un badaud, enfin, est un récit autobiographique et de mémoire couvrant un demi-siècle – des années 1930 à 1980.
L'écrivain revendique désormais être un "badaud", "c'est-à-dire un homme qui pour rien au monde ne renoncerait à un spectacle intéressant". Les "spectacles intéressants" qu'il observe, au cours de son périple, de Kiev à Paris en passant par la Suisse ou le Japon, sont autant d'occasions de se remémorer des souvenirs, de laisser libre cours à ses réflexions et d'imaginer des associations, parfois étonnantes, comme si n'existaient ni les années écoulées, ni les distances géographiques. La force de Nekrassov, son charme, c'est d'associer, d'une phrase à l'autre des entités a priori absolument opposées. Dans un monde divisé, il réunit, il associe. Ce monologue empreint de nostalgie a été écrit au cours de sa période d'émigration forcée, il y décrit parfois avec désapprobation et regret, parfois avec moquerie, mais sans malice, sa réalité quotidienne, car l'émigration est au coeur de sa vie, mais aussi de son oeuvre.
L'écrivain s'interroge sur le sens et les raisons d'un phénomène qui est d'abord, pour lui, une donnée historique, avant de devenir une expérience personnelle. Nekrassov estime même que "le plus grand crime", commis en URSS en soixante-sept ans, a peut-être été "le projet, conçu et concrétisé de façon diabolique, qui consistait à séparer les gens".
Fiche technique
- Reliure
- Broché
- Parution
- 2019
- Nombre de pages
- 570
- Hauteur
- 26
- Largeur
- 17
- Épaisseur
- 3.9
- Poids
- 1.006 kg
- ISBN
- 9791095454359