Qui a tué Jésus-Christ ?

C'est à Jésus-Christ, "Voie, Vérité et Vie", que le 31 juillet 1961, à l'occasion du cinquantième anniversaire de son sacerdoce, le Père capucin Isidore da Alatri dédiait cette brochure visant à défendre l'enseignement traditionnel de l'Eglise, l'historicité des Evangiles et l'autorité des Pères sur la question de la responsabilité juive dans la mort de Jésus (re¬ponsabilité réaffirmée encore en 1937 par Pie XI dans la célèbre encyclique Mit brennender Sorge qui condamnait le National-Socialisme). En effet dans ses œuvres Jésus et Israël (1948-1959) et Genèse de l'antisémitisme (1956) - définies par l'écrivain israélite Rabi comme "l'arme de guerre la plus réussie contre un enseignement chrétien particulièrement nocif" - l'historien Jules Marx Isaac réclamait une "réforme nécessaire de l'enseignement chrétien" sur le judaisme, réforme qui consistait à attribuer aux Evangiles (dont Isaac niait l'historicité) et aux Pères de l'Eglise la responsabilité de la naissance de l'antisémitisme.

Selon Isaac, Jésus n'aurait été qu'un simple homme, tué par les Romains pour cause de subversion. Les Evangélistcs et les Pères auraient porté des témoignages factieux contre les Juifs, leur attribuant la responsabilité de la mort de Jésus afin de gagner les bonnes graces des Romains. Mais ni le Père Isidore ni Mgr Livraghi, l'évêque de Frosinone qui accorda l'imprimatur à cette brochure, ne pouvaient savoir que Jules Isaac, promoteur des Amitiés judéo-chrétiennes, mais aussi membre important du Bnaï-Brith, avait été reçu en audience par Jean XXIII le 13 juin 1960 et que ses instances avaient reçu bon accueil.

En 1965 1e document conciliaire Nostra AEtate (& 4), repris ensuite parle Catéchisme de l'Eglise catholique (& 598) promulgué par Jean-Paul II, répondait favorablement aux réclamations de Jules Isaac en niant la responsabilité du Judaïsme dans la mon de Jésus-Christ. Et, le 24 juin 1985, la note du Secrétariat pour l'unité des Chrétiens "Juifs et Judaïsme dans la prédication et la catéchèse de l'Eglise catholique" ira jusqu'à mettre en doute l'historicité des Evangiles, selon la pensée de Jules Isaac, pensée qui n'est pas sans exercer une influence jusque sur les sentences des tribunaux laïcs.

Alors? "Qui a tué Jésus-Christ?". L'opuscule du Père Isidore, soucieux uniquement de "ne pas trahir, mais dire toute la vérité" est toujours - quarante ans après - d'une bridante actualité...