Une lecture essentielle, à la fois érudite et vivante, pour comprendre ce qui se joue dans la fiction contemporaine et se munir d’arguments solides pour participer au débat d’idées.
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BOULEVARD VOLTAIRE, septembre 2023 :
Blanche-Neige, nanophobe ? Indiana Jones, sexiste ? La série Friends, homophobe et raciste ? OSS 117, sexiste, ringard, réac’ et raciste ? À l’heure de l’inclusion et de la diversité, le 7e art et les séries n’échappent pas à la censure woke. Dans Woke Fiction, un essai aux éditions du Cherche Midi, Samuel Fitoussi analyse avec précision « l’asservissement de la fiction à des contraintes idéologiques. Et à l’idéologie woke en particulier ». « Ce programme comprend des représentations datées et/ou un traitement négatif des personnes ou des cultures […] Ces stéréotypes étaient déplacés à l’époque et le sont encore aujourd’hui ». Par un message qui s’affiche en introduction des plus célèbres de ses dessins animés (Le Livre de la Jungle, Peter Pan, Les Aristochats, La Belle et le Clochard…), Disney, un genou à terre, s’excuse de véhiculer des stéréotypes racistes. Ces films d’animation qui ont bercé tant d’enfances, se retrouvent mis au ban de la célèbre société de production et même interdits au jeune public. Pire, Autant emporte le vent, l’un des plus gros succès de l’histoire du cinéma, est retiré pendant un temps de la diffusion après la mort de George Floyd aux États-Unis.
Le 7e art pour rééduquer
Et pourtant, comme le souligne Samuel Fitoussi, la cancel culture n'est pas la seule menace lancée contre le cinéma. Les réécritures sont-elles-aussi un véritable fléau. Adieu donc les accusations de nanophobie, Blanche-Neige évoluera désormais sans nains. Et sans prince tant qu’à faire. Finies les critiques de racisme contre Peter Pan, dans la version 2023, le jeune héros est indien et son acolyte, la fée Clochette, est noire. Pour le jeune chroniqueur du Figaro, ces réécritures sont loin d’être neutres. Au contraire. « La fiction ne doit plus nous imiter, elle doit nous éduquer », explique-t-il. Et même nous « rééduquer », aurait-il pu écrire. Il n'est désormais plus question de fiction, mais d'idéologie.
À ce sujet — Classiques jugés racistes mis à l’index par Disney+ : Les Aristochats bientôt « interdit aux moins de 12 ans » ?
Montrer des héros vertueux, discriminer les minorités, effectuer un découpage identitaire de la société, ne pas pratiquer d’appropriation culturelle, ne pas propager de stéréotypes de genre, montrer des personnages non blancs gentils et des blancs méchants, détester les hommes, déconstruire les normes… Telles sont les nouvelles règles woke qui doivent régir la production culturelle. À l’aide de logiciels, les scénaristes n’évaluent alors plus leurs récits selon le seul degré d’originalité ou de créativité mais selon leur degré d’inclusivité. Les plus grandes académies du cinéma, à commencer par celle des Oscars, mettent en place des critères stricts – quasi-totalitaires diront certains – pour intégrer et noter les productions. Un des acteurs principaux doit être issu d’un groupe ethnique sous-représenté ou bien 30% du casting doit relever d’un groupe discriminé (femmes, ethnie minoritaire, LGBTQ).
Bac Nord dénigré
Ces nouveaux critères comptent désormais bien plus que le jeu des acteurs, la mélodie de la musique originale ou le talent du réalisateur pour espérer obtenir la petite statuette. Et malheur aux équipes de films qui tentent de déroger à cette règle. En France, note Samuel Fitoussi, il arrive ainsi « encore que certains scénaristes n’intègrent pas les injonctions woke, que certains réalisateurs cherchent à raconter une bonne histoire plutôt qu’à véhiculer les bons stéréotypes ». Mais « ces films n’obtiennent pas la validation morale de la presse progressiste militante. » À peine sorti dans les salles obscures, Bac Nord de Cédric Jimenez, malgré son succès populaire, a fait l’objet d’une importante campagne de dénigrement voire de boycott. « Son crime le plus grave est de ne pas avoir perpétué de stéréotypes négatifs sur les forces de l’ordre ».
Le plus grave n’est pas tant que des films soient « annulés ». Non, « le problème aujourd’hui, c’est ce qui n’est plus produit », alerte l'auteur. La présidente de Disney TV Studios l’admettait elle-même : « Nous recevons parfois des scénarios magnifiquement écrits qui ne remplissent pas nos conditions d’inclusivité, et nous les refusons. » « Combien de chefs d’œuvre n’ont pas vu le jour ? », s’inquiète alors Samuel Fitoussi. Car, n’en déplaise à France Inter qui a tenté de décrédibiliser sur ses ondes le jeune auteur, nous « espérons que cela ne durera pas ».
CAUSEUR, Didier Desrimais, septembre 2023
Comment le wokisme transforme-t-il les films, les séries et, plus largement, l'imaginaire de notre époque ? Un essai stimulant et rigoureux qui plonge au cœur des débats d'aujourd'hui.
Pourquoi Friends, Psychose, Intouchables et Game of Thrones ne pourraient-ils plus être produits tels quels aujourd’hui ? Pourquoi les séries Netflix se ressemblent-elles toutes ? Pourquoi les films Disney ne font-ils plus rêver ?
Dans cet essai percutant, Samuel Fitoussi répond à ces questions et brosse un tableau édifiant du monde de la culture. Il montre que la pression idéologique fait tout d’abord une victime : la liberté artistique.
En s’appuyant sur l’analyse de films et de séries à succès, il identifie les injonctions morales qui pèsent sur la création et transforment – le plus souvent à notre insu – notre imaginaire en champ de bataille politique.
Avec lucidité et rigueur, Woke Fiction éclaire les grands clivages idéologiques de notre époque, dévoilant les erreurs de raisonnement dans les discours militants dominants.
Une lecture essentielle, à la fois érudite et vivante, pour comprendre ce qui se joue dans la fiction contemporaine et se munir d’arguments solides pour participer au débat d’idées.
Fiche technique
- Reliure
- Broché
- Parution
- 2023
- Nombre de pages
- 370
- Hauteur
- 21
- Largeur
- 14.5
- Épaisseur
- 2.9
- Poids
- 0.390 kg
- ISBN
- 9782749177700